Un petit air de liberté
A mon arrivée à la cité U il y a maintenant plus de 3 mois, j'avais été surprise par la présence d'une grille (voir photo ci-contre) dans les escaliers qui joignent les 3 étages où résident les étrangers (13ème, 14ème et 15ème étages) et ceux où habitent les étudiants russes (du 1er au 12ème).
Cette démarcation engendrait un certain nombre de complications. Par exemple, en cas de panne de l'ascenseur, il fallait appeler avec une sonnette (qui ne fonctionnait d'ailleurs pas) la 'diéjournaya' (surveillante, personne de garde) assignée aux étrangers pour qu'elle vienne décadenasser la grille. Grille qui empêchait également les étudiants étrangers de rentrer après 1 heure du matin puisque la 'diéjournaya' n'avait pas le droit d'ouvrir la grille passé ce couvre-feu (plus ou moins des brouettes comme j'en ai fait l'expérience en rentrant à 1h15 à cause d'un métro qui n'arrivait pas).
Selon les rumeurs, cette ligne de démarcation avait été mise en place parce qu'il y a quelques années, des étudiants russes (qui, pour le dire délicatement, ne sont généralement pas connus pour leur tolérance vis-à-vis des étrangers n'ayant pas le "teint règlementaire") étaient montés tabasser des étrangers dans leur chambre.
Un autre aspect de cette grille est que les étudiants étrangers ne pouvaient pas inviter des étudiants russes de la cité universitaire à venir dans leur chambre, ou alors selon le protocole instauré par la résidence, à savoir que le visiteur doit avoir quitté les lieux à 23 heures et les deux étudiants doivent donner leurs passeports ou leurs 'propousks' (laissez-passer) à l'une des 'diéjournayas'. De plus, cette grille signifiait que le seul accès "libre" aux étages des étrangers était par l'ascenseur (qui, parmi les 3 étages des étrangers, ne dessert que le 14ème étage, obligeant ainsi à passer devant la 'diéjournaya' à chaque entrée ou sortie).
En résumé, aussi insignifiants que puissent paraître ces quelques tiges de métal et ce cadenas, ils étaient lourds de conséquences.
C'est pourquoi mon coeur a bondi dans ma poitrine quand j'ai remarqué aujourd'hui que cette grille n'était plus. Ils l'ont retirée (visiblement pas temporairement puisque même les fils de la sonnette ont été coupés) !
C'est une sorte de micro-chute du mur de Berlin qui plane dans la résidence, preuve que petit-à-petit, les choses peuvent changer, même en Russie.